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LE CHEVALIER BAYARD DEFENSEUR DE LA BELLE EMMANUELLE

23 septembre 2020, le public présent au CCC de Paray-le-Monial n’en a pas cru ses yeux et ses oreilles. Au lieu d’assister à une séance du Conseil Municipal, il eut droit à la représentation gratuite d’un vaudeville en trois actes intitulé : « Le chevalier Bayard, sans peur et sans reproches, défenseur de la belle Emmanuelle ». Voilà le premier acte.

Avec armure et heaume, chevauchant son cheval blanc, le chevalier Bayard fonce, lance en avant, sur tous les manants qui lorgnent vers la belle Emmanuelle.

1er ACTE: IL ATTAQUE LES MANANTS

Bing ! bang ! clash ! la manante Mantoue qui comptoit les redevances de la communauté des manants et disoit que l’eau estoit un bien commun, que la belle Emmanuelle la faisoit payer trop cher aux pauvres, et qu’il falloit au contraire, l’augmenter pour les riches !

Bing ! bang ! clash ! le manant Etaix levant les bras au passage des chevaux au triple galop dans sa ruelle cambone, et disoit que le jardin de sa rue n’estoit pas propre tandis que ceux de la belle estoient nettoyés tous les jours.

Bing ! bang ! clash ! quand ledit Dumeusois osoit lui demander pourquoi les charettes qui conduisent les petiots vers les comedies du Champ Bossu coustoient 95000 écus aux manants ?

Mais quand la manante Lemétayer exigeoit de virer les grands seigneurs, amis de sa belle, de haute naissance, forts savants, beaux parleurs, figure avenante, mais félons, renegats, sans religion, violeurs de femmes et d’enfants…là le public n’en crut pas ses oreilles : au lieu de vitupérer, criailler, ameuter ses troupes, comme il faisoit pour les autres, le chevalier Bayard fut comme saisi et resta quasiment coi : il dit qu’il n’entendoit pas la voix de la manante, que le malin avoit coupé la parole qui venoit à lui et qu’il falloit conjurer le sort. Il ajouta qu’il connaissoit bien le pacte qui dit que le chevalier devoit protéger la veuve et l’orphelin, disoit même qu’il le connaissoit par cœur. Mais que c’étoit tout. Il le connaissoit mais ne faisoit rien.

2ème ACTE: IL CAJOLE DAME EMMANUELLE

Pour se faire pardonner d’avoir si mauvais sujets, le chevalier Bayard alla se mettre à genoux devant la belle Emmanuelle et lui fit, les yeux tout enamourés, devant tous les manants assemblés, deux beaux présents pris aux biens de la communauté qu'il vouloit ainsi punir de son insolence:

-un parc pour charrettes à côté de son chasteau et qui estoit avant pour les grands enfants des manants des villages qui n’avoient, disoit-il qu’à marcher jusqu’à leur école ;

- et puis une promenade, près de la rivière, avec une jolie allée bien droite et bien propre, les manants, pretendoit-il, n’avoient qu’à travailler pour payer les redevances plutôt que se promener.

La dame le remercia poliment avec néanmoins petite moue et petits regards furtifs du costé du parc du Moulin Liron...

Et le lendemain la gazette du pays et les crieurs publics dirent partout que les manants avoient osé lever les yeux sur la belle Emmanuelle tandis que lui, le chevalier servant et ses vassaux, lui faisoient de beaux cadeaux, embellissoient son domaine et augmentoient sa cassette, ce que ne faisoient pas lesdits manants. Mais se gardoient bien, derrière propos fallacieux, de clamer ce que disoient les manants, surtout la manante Lemétayer que faisoient parler faussement.

3ème ACTE: LES MANANTS PAS CONTENTS

Pendant ce temps, les manants pas contents juroient qu’ils ameuteroient tous les vilains et manants du comté pour défendre leur territoire grignoté encore et encore pour les yeux de la belle Emmanuelle… qu’ils feroient une jacquerie pour forcer le chevalier Bayard à dire NON à sa belle, respecter règles de seigneurie qui, dans les terriers connus de leurs ancêtres, marquoient depuis temps immémoriaux, les limites des terres et les droits.

Car ils craignoient que la belle vouloit attempter aux chartes des droits et libertés qui avoient été gagnés par force et rudes combats de leurs ancêtres, tous serfs levants et couchants devant les belles du temps jadis…

Craignoient aussi que le droit de cuissage qui revenoit ne soit puni par justice pour cause de silence, protection, dissimulation dans quelque château ou abbaye amie…

Alors tous d’un seul élan, allèrent quérir leurs serpes, bâtons, et fourches…tout en chantant :

AUX ARMES, LES MANANTS,

FORMEZ VOS BATAILLONS,

MARCHONS, MARCHONS,

AU MOULIN LIRON

QU'UN SANG IMPUR,

ABREUVE NOS SILLONS !!

BING !!!BANG !!!CLASH !!!